Le Groupe de la Banque mondiale a publié, en octobre 2025, le 32e volume de sa série économique Africa’s Pulse, intitulé « Comment créer des emplois en Afrique ». Réalisé par le Bureau de l’économiste en chef pour la région Afrique, ce rapport analyse les dynamiques économiques récentes du continent et propose des pistes concrètes pour stimuler la création d’emplois durables. Le thème central, « Des voies vers la création d’emplois en Afrique », met en lumière les politiques et les réformes nécessaires pour transformer la croissance économique en opportunités réelles pour la population.
Le rapport souligne que la croissance du PIB réel en Afrique subsaharienne devrait atteindre 3,8 % en 2025 et progresser à une moyenne annuelle de 4,4 % entre 2026 et 2027. Cependant, cette croissance, encore trop faible par habitant, reste insuffisante pour réduire sensiblement la pauvreté extrême. L’inflation, quant à elle, devrait se stabiliser autour de 4 % au cours des deux prochaines années, portée par l’évolution des prix mondiaux du pétrole et des produits alimentaires. En matière de finances publiques, les déficits budgétaires devraient progressivement se résorber pour laisser place à des excédents d’ici 2027. Néanmoins, la vulnérabilité de la dette demeure préoccupante près de la moitié des pays de la région, soit vingt-trois États, sont aujourd’hui exposés à un risque de surendettement élevé. Les indicateurs de confiance, tels que l’indice des directeurs d’achat (PMI), montrent une reprise progressive de l’activité, mais les niveaux d’investissement privé restent encore trop faibles pour soutenir une croissance soutenue et inclusive.
La question de l’emploi constitue le cœur du rapport. La Banque mondiale rappelle que la population en âge de travailler augmentera de plus de 620 millions de personnes d’ici 2050, représentant à la fois un défi colossal et une opportunité unique. Pour y répondre, l’Afrique doit investir massivement dans les infrastructures, le capital humain et la modernisation de son économie. Le rapport souligne que plus de 70 % des entreprises en Afrique subsaharienne subissent des coupures d’électricité récurrentes, freinant la productivité et la compétitivité. L’accès au numérique joue également un rôle déterminant, dans les pays où l’Internet haut débit est plus répandu, les taux d’emploi progressent de 5 à 7 %. En matière de capital humain, la région affiche un score moyen de 0,4 à l’Indice du capital humain de la Banque mondiale, l’un des plus bas au monde, ce qui souligne l’urgence d’investir dans l’éducation, la santé et la formation professionnelle.
L’amélioration du climat des affaires est tout aussi essentielle. Le coût d’enregistrement d’une entreprise représente encore près de 42 % du PIB par habitant dans de nombreux pays, freinant la formalisation du secteur privé. Par ailleurs, plus de 80 % du financement des jeunes entreprises africaines proviennent de l’étranger, preuve du manque de profondeur des marchés financiers locaux. La gouvernance demeure un obstacle majeur, près d’une entreprise sur quatre déclare avoir recours à des pratiques de corruption pour obtenir des marchés publics, ce qui entrave la transparence et décourage les investissements.
Le rapport identifie plusieurs secteurs capables de générer une croissance inclusive et de vastes opportunités d’emploi. L’agro-industrie demeure le principal employeur du continent, représentant plus des deux tiers des emplois totaux, et recèle encore un potentiel considérable d’industrialisation et de transformation locale. Le secteur minier, qui ne représente que 3,5 % de l’emploi total, bénéficie d’une demande mondiale croissante en minéraux stratégiques pour la transition énergétique, ouvrant la voie à des chaînes de valeur régionales. Le tourisme, quant à lui, employait directement 8,8 millions de personnes en 2023 et crée en moyenne un emploi et demi supplémentaire pour chaque poste direct. Le logement et la construction figurent également parmi les priorités, avec un déficit estimé à plus de 130 millions d’unités d’ici 2030. Enfin, le secteur de la santé offre un potentiel considérable avec seulement 0,23 médecin pour 1 000 habitants, la région doit créer des milliers d’emplois pour renforcer son système de santé et améliorer la productivité globale.
Sur le plan des politiques publiques, la Banque mondiale insiste sur la nécessité d’une gestion budgétaire plus efficace pour soutenir la croissance et l’emploi. Elle recommande de renforcer les administrations fiscales, d’élargir la base de revenus, et de rationaliser les dépenses pour concentrer les ressources sur les investissements productifs. Le rapport cite l’exemple du Kenya, où certaines réformes fiscales et budgétaires ont permis d’augmenter le PIB, d’améliorer les salaires réels et de réduire le ratio dette/PIB.
Enfin, ce 32e volume d’Africa’s Pulse rappelle que la création d’emplois constitue la pierre angulaire du développement durable du continent. Pour transformer sa croissance démographique en levier économique, l’Afrique doit miser sur la productivité, la bonne gouvernance et l’investissement dans le capital humain. En combinant politiques publiques efficaces et partenariats solides, elle dispose de tous les atouts pour bâtir un avenir plus prospère, inclusif et résilient.










































