Le rebond observé des envois de fonds à destination de l’Afrique devrait se poursuivre en 2022, considère la Banque mondiale, au vu d’une étude rassurante sur la solidarité des expatriés. Le coût des transferts demeure un écueil. En 2021, les transferts de fonds progresseraient de 9,7% vers la région Afrique du Nord et Moyen-Orient, et de 6% à destination de l’Afrique subsaharienne.

Tels sont les enseignements d’une étude conduite par Knomad (Global Knowledge Partnership on Migration and Development) et commentée par la Banque mondiale. Qui estime que la tendance devrait se poursuivre en 2022. Au total, les envois de fonds vers les pays que l’institution qualifie « à revenu faible et intermédiaire » devraient enregistrer une hausse de 7,3 %, pour s’inscrire à
589 milliards de dollars. Un rebond supérieur aux prévisions antérieures. On se souvient qu’en 2020, les « remises migratoires » n’ont diminué que de 1,7 %, en dépit de la grave récession mondiale provoquée par pandémie de la Covid-19. Pour la deuxième année consécutive, les transferts d’argent vers les pays à revenu faible et intermédiaire (hors Chine) devraient excéder la somme des IDE (Investissements directs à l’étranger) et de l’ADP (Aide publique au développement). « Ce constat souligne l’importance de ces flux, qui constituent une véritable bouée de sauvetage en permettant aux ménages de financer des produits essentiels tels que la nourriture, la santé et l’éducation pendant les périodes de difficultés économiques dans les pays d’origine des migrants », commente la note.
« Faciliter ces envois de fonds pour soulager les budgets des ménages mis à rude épreuve devrait être un élément clé des politiques nationales visant à soutenir un redressement global après la pandémie », commente Michal Rutkowski (BM).


« Pour que les fonds continuent de circuler, en particulier par les canaux numériques, il est essentiel de permettre aux migrants et aux opérateurs de transferts de fonds d’accéder à des comptes bancaires », souligne Dilip Ratha (Knomad), auteur principal du rapport. « Les réponses politiques doivent également continuer à faire une place aux migrants, notamment dans les domaines de l’accès aux vaccins et de la protection contre les défauts de paiement. »
Un coût encore élevé des transferts Knomad estime que les transferts de fonds devraient augmenter de 2,6% en 2022, dans le sillage des prévisions macroéconomiques mondiales. Lesquelles sont soumises au risque de résurgences de la pandémie et de ses restrictions à la mobilité. Un gros point noir subsiste : le tarif pour l’envoi de 200 $ entre pays reste élevé, il représente en moyenne 6,4 % des flux, selon les chiffres du premier trimestre 2021. Un niveau deux fois supérieur à l’objectif de 3 % à l’horizon 2030 fixé par les Objectifs de développement durable. Et c’est toujours en Afrique subsaharienne qu’il est le plus coûteux d’envoyer de l’argent (8 %) et en Asie du Sud que le tarif est le plus bas (4,6 %). La BM fait observer que les frais sont souvent plus élevés quand les fonds sont transférés par l’intermédiaire de banques, plutôt que via des canaux numériques ou des opérateurs offrant des services de transfert d’espèces. En Afrique subsaharienne, bien que les migrations intrarégionales représentent plus de 70 % des mouvements transfrontaliers de population, les frais sont élevés en raison des faibles quantités de flux formels et de l’utilisation des taux de change du marché noir.


Dans le détail, les envois de fonds vers les pays en développement de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord devraient avoir augmenté d’environ 9,7 % en 2021 pour atteindre 62 milliards $, grâce au retour à la croissance dans les pays d’accueil de l’Union européenne (France et Espagne notamment) et à la flambée des prix mondiaux du pétrole. La hausse est spectaculaire pour le Maroc (+25% à 9,3 milliards $) et plus
généralement pour le Maghreb (+15,2%). Le coût des transferts est passé de 7% à 6,3% des envois. La tendance devrait se poursuivre en 2022, mais à un rythme plus lent, dans le sillage de la croissance économique en Europe.


Forte résilience


En Afrique subsaharienne, le rebond est modéré à destination du Nigeria, qui reste le premier bénéficiaire de la région. En cause, les politiques de contrôle des flux financiers transitant par le système bancaire. Dans la région, les envois de fonds devraient augmenter de 5,5 % en 2022, calcule la BM. « L’Afrique, embourbée dans une crise de la dette qui s’aggrave, comptera sur un soutien extérieur pour faire face à ses besoins de financement. Mais la résilience plus forte des envois de fonds des travailleurs migrants face à la détérioration des conditions économiques a été clairement démontrée dans la région », souligne le rapport. En 2022, l’Afrique sera confrontée au renchérissement des prix des produits alimentaires, phénomène qui, en général, provoque un regain de générosité de la part des diasporas.

Sachant que la région devrait, au plan économique, bénéficier d’une amélioration des termes de l’échange et de la hausse des prix des matières premières. Davantage de recettes fiscales qui pourraient se traduire par une baisse relative des revenus issus des transferts et de l’Aide au développement.(Le Magazine de l’Afrique).